Que nenni. Barrières mentales à la con. Le concert de musique classique devrait s'adresser à tous. J'ai à l'esprit une conversation rapportée par ma mère. Son employeur, prof d'anglais dans un lycée technique s'adressant à sa femme de ménage (ma mère) trouvait naturel de ne pas envoyer ses élèves à l'opéra parce que c'était comme donner de la confiture aux cochons, ils n'aimeraient pas et de toute façon ne comprendraient rien. Apparemment je ne suis pas la seule à jouer du préjugé et comprends pourquoi les enfants des zep n'auront jamais le loisir de découvrir autre chose que les centres commerciaux, espace culturel par défaut. La consommation comme culture, voilà une maxime chère à notre président. Cette France-là, inégale, m'énerve.
J'étais assise à côté d'une gamine de 5 ans et de sa jolie frange blonde, bien peignée à droite et moi, j'étais là, pas très à l'aise avec ma place gratuite et sans mes mômes. Je me suis dit, merde ce n'est pas juste, il faudrait vraiment qu'ils vivent ça un jour. C'est beau et impressionnant un orchestre au complet, tous ces violons, altos, violoncelles, contrebasses "Regarde celui-ci ! il est surmonté d'une tête de dragon sculpté." Flûtes, hautbois, clarinettes, bassons, cors, trompettes, trombones, tuba, timbales, percussions... Sans oublier les stars, le piano à roulettes et le chef d'orchestre sans baguette.
Ramassés en un si petit espace et si hétéroclites, on avait peine à croire qu'une musique harmonieuse allait sortir de cet ensemble, d'autant que les échauffements de chacun livraient un charivari monstrueux. Et pourtant l'alchimie avait opèré, à l'arrivée de K. Karabits public et instruments s'étaient tu illico jusqu'au déroutant Wailing de Lu Wang. Comment qualifier l'oeuvre de cette jeune chinoise ? 8' durant lesquelles j'ai pensé à un drôle de mix, une musique de dessin animé de Tex Avery couplée à celle d'un film. Très étonnant.
Le 3è concerto pour piano et orchestre de Rachmaninov fut assez risible. Le pianiste Nikolai Demidenko en faisait des tonnes, on aurait dit un roseau en pleine tempête et ses longues plages romantiques étaient vraiment pénibles. J'attendais avec impatience la prestation du cymbaliste qui à chaque claquement levait haut une jambe, ce drôle de flamant rose avait le nez rouge comme un poivrot et jurait avec ses élégants comparses.
Le 3è concerto pour piano et orchestre de Rachmaninov fut assez risible. Le pianiste Nikolai Demidenko en faisait des tonnes, on aurait dit un roseau en pleine tempête et ses longues plages romantiques étaient vraiment pénibles. J'attendais avec impatience la prestation du cymbaliste qui à chaque claquement levait haut une jambe, ce drôle de flamant rose avait le nez rouge comme un poivrot et jurait avec ses élégants comparses.
Après l'entracte, la magie m'est tombée dessus. Je suis rentrée dans la musique. La symphonie n°6 de Chostakovitch. J'étais transportée, scotchée autant par l'oeuvre que par la performance. Pas de temps mort, les musiciens étaient tous à la tâche, pas un à se gratter le nez, fallait voir cette forêt d'archets, tantôt guerrière, droits comme des lances ou sensuelle, glissant lentement et doucement sur la corde pour sortir de longs gémissements, et le K. K. à fond dans sa course équestre, du haut de son pupitre il trottait tel un jeune poulain. Tous suaient l'énergie. Un spectacle sidérant et prenant. Vraiment beau moment.
Faudrait vraiment que je partage ce genre d'émotion avec mes mômes.